Bio : vers un nouveau point d’équilibre ?

Une perte d’ancrage qui fait retomber le Bio à des niveaux en-deçà de ceux atteints en 2019. Mais il y a des raisons d’espérer.
15 décembre 2022
pommes de terre bio
gaelle le floch
Gaëlle
Le Floch

Strategic Insight Director

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Le Bio au total PGC-FLS perd de l’ancrage dans les habitudes d’achats des Français. Certes, tout le monde en achète, le relais recrutement ayant fait le plein, et l’attractivité se maintient. Mais derrière cette apparente bonne nouvelle se cache une déconsommation. Les shoppers réduisent leurs dépenses de 15€ en moyenne par an et par foyer. Ils dépensent moins car ils espacent leurs visites (1 acte en moins sur les 12 derniers mois versus les 12 précédents) tout en achetant moins à l’acte (-29 centimes ou -0.1 UC).

Une situation encore plus délicate au total des PFT: 600 000 foyers achetaient des PFT Bio l’année dernière et ne sont pas revenus en acheter au cours des 12 derniers mois. Un rayon qui pâtit davantage encore de l’inflation. Hors alimentaire, nous observons également un retournement de situation pour le Bio, notamment au sein du rayon Hygiène-Beauté.

Un phénomène inquiétant.

Le poids du Bio dans les dépenses des Français retombe ainsi en-deçà des niveaux de 2019 (4.8% de PDM valeur au CAM P10 2022 sur un total PGC-FLS tous circuits confondus en recul de 0.1 pt versus le CAM P10 2019), et ne constitue plus le réservoir de croissance des PGC-FLS. Après l’âge d’or jusqu’en 2018, puis la crise sanitaire et ses achats paniques, il faut désormais naviguer au gré des remous d’une crise inflationniste et surtout défendre le Bio pour conserver les assortiments.

Malgré tout, il subsiste des raisons de ne pas lâcher.

Premièrement si nous resituons le bio dans une perspective long-terme, la démocratisation du Bio est sans précédent. Alors que le bio ne touchait « qu’un » foyer français sur 2 à l’aube des années 2000, 22 ans plus tard la quasi-totalité des foyers français en achète.

Deuxièmement, la raison d’être du Bio s’inscrit toujours dans les préoccupations des foyers français. Certes, les préoccupations budgétaires prennent de l’ampleur mais l’écologie arrive aussi en tête. Quant à la santé, c’est la 4ième inquiétude des foyers français. Ne l’oublions pas.

Prenons également la juste mesure d’une part mécanique dans ce repli. La crise sanitaire a éclipsé le sujet des pesticides et a touché le Bio au cœur de sa fragilité. Une fragilité qui réside dans son caractère singulier, à savoir une offre de masse et niche à la fois. Comme le revers d’une même médaille. Tout le monde en achète mais relativement peu par rapport au reste de leurs achats (4.5 fois moins d’actes sur le Bio vs le conventionnel et 4.7 fois moins d’UC Bio vs les UC non Bio dans un panier) et ceci même chez les plus gros acheteurs. Cette singularité le rend d’autant plus fragile à toute contraction de la fréquence d’achat. Et c’est ce qui s’est passé. Les consommateurs pendant la crise sanitaire ont fait davantage de pleins voire des gros pleins, même post-achats panique, tout en ayant l’impression d’une hausse des prix (et ceci bien avant l’inflation). Ce qui en définitive a pénalisé l’offre Bio.

Enfin, nous observons dans nos récentes enquêtes que les Français remettent l’accent sur la qualité de leurs assiettes en plus de scruter le prix.

Des bonnes raisons d’espérer et de ne pas désinvestir, mais qui malgré tout ne seront pas suffisantes pour sécuriser le bio. Il faut agir vite sur les raisons structurelles de ce déclin.

Redonner l’envie et reconsolider en profondeur :

Il faut agir car les ménages sont moins nombreux à déclarer « vouloir à l’avenir acheter plus souvent des produits alimentaires biologiques ». Et une plus grande part d’entre eux demeure dans l’indécision : 24% d’entre eux ne savent pas s’ils vont augmenter, maintenir ou diminuer leurs achats de produits alimentaires bio (Juin 2022 vs 7% il y a 5 ans) et seulement 15% ont l’intention d’augmenter leurs achats au cours des 6 prochains mois (-18 pts versus 2018).

Nous recommandons 4 actions fortes à la fois sur la communication autour du label et sur la disponibilité des produits.

1 | Recommuniquer plus massivement sur les promesses fondamentales du label : un impératif dans un contexte à double enjeu. D’une part, les labels/mentions inspirent de moins en moins confiance et ont perdu de leur force de persuasion. D’autre part, les raisons qui poussent à acheter bio s’étiolent. Le duo « bénéfices santé » et « bénéfices environnement » vont de pair avec la motivation des consommateurs. Plus les consommateurs sont en recherche de réassurance sur ces deux champs simultanément, plus leurs niveaux de conviction et de fidélité au bio augmentent. Or, les consommateurs ont moins déclaré acheter bio pour ces raisons pourtant clés dans leur processus de décision. Une baisse en continu depuis 2020. Il faut parler fort et réaffirmer l’exemplarité.

2 | Passer à l’offensive et reprendre de la distance par rapport aux autres labels et mentions : l’environnement concurrentiel n’est plus le même. Par exemple, le nutri-score a connu une irrésistible ascension apportant une réassurance aux shoppers. 96% des foyers le connaissent versus seulement 21% en 2018 (notoriété assistée). 40% estiment que cela leur permet de choisir des produits meilleurs pour la santé. 1/3 des foyers le considèrent très important lorsqu’ils achètent certains produits.

3 | Limiter les hausses de prix pour ne pas marginaliser le Bio en ces temps de crise inflationniste. Travailler l’accessibilité dans le respect de la chaîne de valeur. La justification prix est toujours importante à travailler. Le prix reste le frein n°1 à l’achat du bio mais un frein étonnement en régression (69% des sondés vs 74% en 2018). En fait, le consommateur interroge au-delà du prix facial le rapport qualité-prix. Autrement dit, nous sommes face à une remise en question de la juste place à accorder au Bio dans son panier d’achat. Il ne faut pas circonscrire le problème actuel uniquement aux tensions sur le pouvoir d’achat. La baisse ne se concentre pas sur les foyers aux contraintes financières les plus fortes. Le marché n’a pas non plus changé de visage en termes de classes socio-économiques.

4 | Sur l’alimentaire, la qualité et le goût perçus par rapport aux produits non bio sont sanctionnés. Ce sont des pré-requis. Des critères qui peuvent paraître secondaires mais qui en réalité sanctionnent l’image du bio s’ils ne sont pas satisfaits : -2 pts d’approbation à l’affirmation suivante « les produits alimentaires bio sont de meilleure qualité que les produits alimentaires non bio », et -5 pts sur l’affirmation suivante «les produits alimentaires bio sont de meilleur goût que les produits alimentaires non bio ».

 

À propos de l’étude :

Données achats pour la consommation au domicile PGC-FLS issues du panel 20 000 ménages représentatifs des ménages ordinaires français (selon les critères de l’INSEE), données PFT issues du panel 12 000 ménages déclarant leurs achats non « gencodés » représentatifs des ménages ordinaires français (selon les critères de l’INSEE).

Données attitudinales sur la consommation Bio et 3ième édition de l’étude Labels : questionnaires LinkQ administrés en juin 2022 auprès de 11 661 interviews de PRA représentatives des foyers français. Ces PRA sont issues de notre panel de 20 000 foyers déclarant tous leurs achats PGC. Ces foyers sont représentatifs de la population française en termes de profil sociodémographique des critères de l’INSEE.

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