1. Indifférents, les Français ne sont pas mobilisés
L’abstention atteint un niveau record, 2 Français sur 3 ne se sont pas rendus aux urnes (66%). C’est 16 points de plus que lors du précédent scrutin de 2015 et c’est un record absolu dans l’histoire de la Vème République si l’on excepte le référendum sur le quinquennat en 2000.
Cette hausse de l’abstention s’observe sur l’ensemble du territoire et elle est particulièrement élevée dans des régions à forts enjeux comme les Hauts de France (+22), les Pays de la Loire (+19,2), le Grand Est (+18) ou encore la Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) (+18,2).
Une abstention record qui illustre l’indifférence des Français à l’égard de ce scrutin, laquelle se nourrit de l’absence d’impact perçu de leur vote mais aussi d’une campagne qui s’est pour beaucoup focalisée sur les jeux d’appareils : dans notre enquête sur l’état d’esprit des Français à l’approche des régionales début juin, une majorité de Français se disait en effet indifférente (49%). Les Français exprimaient aussi un faible niveau de proximité ressenti avec leurs conseils départementaux et régionaux et ne souhaitaient pas entendre parler des stratégies d’alliance dans cette campagne.
2. Une nette prime au sortant et notamment pour les présidents Les Républicains
Sur les 12 régions continentales et à l’exception de la PACA, toutes les listes menées par les présidents sortants arrivent en tête à l’issue du 1er tour.
La droite est en tête dans 6 régions (soit 2 de plus qu’en 2015 au soir du 1er tour) et certains candidats peuvent même se targuer d’une très nette avance et de scores bien supérieurs à ceux de 2015 comme Laurent Wauquiez (LR) en Auvergne-Rhône Alpes avec 43,79% des voix soit une avance de 29 points par rapport à la liste EELV en 2e position, Xavier Bertrand (soutenu par LR) dans les Hauts-de-France avec 41,39% (17 points devant la liste RN en 2e position) ou Valérie Pécresse (soutenue par LR) en Ile-de-France avec 35,94% des suffrages soit 22 points de plus que la liste du Rassemblement national qui arrive en deuxième position.
3. La gauche résiste bien, elle aussi, avec 5 listes en 1ère position
Soit 3 de plus qu’en 2015 au soir du 1er tour. C’est notamment le cas en Occitanie avec la socialiste Carole Delga qui progresse et recueille 39,57% des voix et dans une moindre mesure en Bourgogne-France Comté (26,52%) avec Marie-Guite Dufay.
Des bons scores de la gauche qui illustrent cependant la recomposition en cours et la question à venir du leadership dont le Parti socialiste ne semble plus avoir le monopole : les écologistes arrivent en effet en tête des forces de gauche en Auvergne-Rhône Alpes, en Ile-de-France ou dans le Grand Est. Ils sont même en tête du 1er tour dans les Pays de la Loire avec la candidature du député et ancien Marcheur Matthieu Orphelin. Notons aussi que là où il y avait compétition EELV vs. PS et où le PS n’était pas sortant c’est EELV qui l’a emporté.
Un constat qui s’ajoute aux cas de la PACA et des Hauts-de-France où la liste d’union de la gauche était menée par des écologistes.
4. Le Rassemblement national recule
D'habitude bénéficiaire des scrutins à forte abstention et alors même qu’il était au centre du récit médiatique de la campagne électorale, les listes du Rassemblement national n’ont pas réussi à mobiliser leurs électeurs. Comme s’il était désormais devant un dilemme qui peut lui faire perdre des suffrages : la volonté de se dédiaboliser pour élargir son socle électoral tout en continuant à incarner l’« anti-système » mobilisateur. A l’inverse cette abstention a placé les retraités au cœur de l’élection ce qui leur a été défavorable : ces derniers votent généralement davantage et ont privilégié les sortants.
Le RN recule partout, parfois même fortement comme dans les Hauts-de-France (-16 pts), le Grand-Est (-15 pts) ou Auvergne Rhône Alpes (-13 pts).
Il arrive en tête uniquement en PACA, alors qu’il l’était dans 6 régions en 2015.
5. La République en marche ne décolle pas
Buttant toujours sur son absence d’ancrage territoriale, le constat est sévère pour les listes de la majorité présidentielle : La République en marche est éliminée dans trois régions (notamment dans les Hauts-de-France avec 5 ministres ou secrétaires d’Etat présents sur les listes) et nettement distancée dans toutes les autres.
Au-delà de ces constats, ce scrutin illustre une nouvelle fois la recomposition de l’offre politique française en cours, qui se traduit, à date, par un éclatement de la vie politique : de manière théorique, 4 régions pourraient avoir des triangulaires (11 en 2015), 4 des quadrangulaires (1 en 2015), 4 des quinquangulaires (1 en 2015) avec même la possibilité d’avoir 6 listes au 2nd tour en Ile-de-France. Il semble que le corps électoral Français continue d’osciller entre différentes manières (vote hors systèmes, mouvements sociaux, abstention) d’exprimer sa frustration à l’égard de la vie politique.